Le constat du vieillissement accéléré de la population d’une partie des outre-mer étant posé, la réponse des différents acteurs concernés, publics comme privés, est attendue. 

Le vieillissement n’est pas un drame absolu d’abord dans la mesure où il s’accompagne d’une hausse de l’espérance de vie, ce qui est toujours réjouissant ; ensuite parce que toutes les personnes âgées ne deviennent pas dépendantes et parce que nombre d’entre-elles ont encore beaucoup à apporter à leur famille, sur le plan affectif, économique, culturel à leurs enfants ou petits-enfants. 

Mais le vieillissement et la « gestion » de la fin de la vie d’une partie de la population font immanquablement apparaître des opportunités économiques et des créations d’emplois pérennes liées aux services à la personne ainsi qu’à la construction et à la gestion de structures d’hébergement. Toutefois, pour que la fin de vie de nos aînés ne se transforme pas seulement en un juteux négoce, il convient de conserver la dimension humaine au centre des préoccupations en veillant à l’information, au confort et au respect des volontés des personnes concernées. 

I. TOUTE UNE ACTIVITÉ LIÉE À LA DÉPENDANCE SE DÉVELOPPE 

La France hexagonale mais aussi bien d’autres pays occidentaux, ont déjà été confrontés à la gestion du vieillissement d’une partie de leur population. Le retour d’expérience démontre que l’activité liée au grand âge, parfois appelée « Silver Economy », en référence à la couleur des cheveux de nos aînés, constitue une opportunité économique à qui sait la saisir. Les outre-mer devront toutefois composer avec les contraintes spécifiques liées à l’éloignement et à l’insularité. 

A. LÉCONOMIE DU GRAND ÂGE EST UN RÉSERVOIR D’EMPLOIS 

Selon les représentants de la Fédération des services à la personne (FEDESAP), le secteur représenterait au niveau national 3 500 entreprises pour un total d’environ 800 000 salariés. Avec le vieillissement de la population française, ce secteur économique ne peut que croître. 

1. Les services à la personne doivent favoriser l’emploi outre-mer 

Dans les outre-mer plus encore que dans l’hexagone, les services à la personne apparaissent comme l’un des secteurs les plus prometteurs sur le plan de 

l’emploi. En effet, face à un taux de chômage supérieur à la moyenne nationale, le développement de ces métiers – non délocalisables – apparaît comme une source prometteuse d’emplois. 

Pour autant, il convient que les intéressés soient convenablement formés. Or, selon nos interlocuteurs, il semblerait que seulement 4 % des demandeurs d’emploi entrés en formation professionnelle via Pôle Emploi suivent une formation qualifiante sur les métiers des services à la personne dans les outre-mer 

Pourtant, ce secteur attire. Ainsi, à La Réunion plus de 14 000 demandeurs d’emplois se déclareraient intéressés par les métiers des services à la personne, la plupart étant des femmes âgées de 40 ans ou plus, particulièrement touchées par les questions d’emploi. Ainsi, les services à la personne semblent constituer un secteur professionnel attrayant. 

Le premier vice-président du Conseil départemental de La Réunion, M. Jean-Marie Virapoullé, que la mission d’information a rencontré, a souligné que les opérateurs de services à la personne recrutaient entre 300 et 400 personnes par an, ce qui constitue une aubaine compte tenu du chômage existant sur le territoire. Le niveau de diplôme ne constitue pas le premier critère, mais c’est plutôt la motivation qui est évaluée. Les intéressés sont généralement embauchés sur la base d’un contrat à durée déterminée, mais les contrats à durée indéterminée arrivent rapidement si les intéressés donnent satisfaction. Ils sont généralement formés par leurs employeurs qui recherchent davantage un savoir-être qu’un savoir-faire, acquis par l’expérience et la formation. 

2. L’instabilité juridique et le coût du travail sources d’inquiétudes 

Dans les outre-mer comme dans le reste du pays, l’instabilité juridique qui touche de nombreux métiers des services à la personne, et en particulier depuis le 1er janvier 2016, ceux de l’aide aux personnes âgées en situation de dépendance et des personnes en situation de handicap, suscite une certaine inquiétude quant à la mise en oeuvre de loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, dite loi ASV. 

Par ailleurs, l’application des dispositions des conventions collectives nationales, malgré les quelques différences que ces dernières peuvent présenter selon le régime des structures, associatives et entrepreneuriales, génère les coûts du travail qui nuisent à leur compétitivité face à celui de l’économie illégale du travail non déclaré. 

Dans ce contexte, les organismes de services aux particuliers recommandent de prendre des dispositions de maîtrise du coût du travail afin de retrouver de la compétitivité et ainsi la capacité du maintien de l’activité déclarée. 

Le travail non déclaré doit évidemment être sévèrement combattu, sans qu’il soit perdu de vue que ces activités illégales existent aussi parce que l’offre de 

prestations légales est souvent insuffisante ou trop onéreuse pour des populations vivant dans la précarité. 

3. Les attentes des seniors en matière d’habitat inclusif 

À la demande de la Fédération des services aux particuliers (FESP) et de ses partenaires, une étude a été réalisée auprès des Français âgés de 50 ans et plus afin d’appréhender leur état d’esprit et leurs attentes en matière de services à la personne, notamment en ce qui concerne l’habitat inclusif. 

Ainsi, sur l’ensemble du territoire national, les seniors apparaissent majoritairement pessimistes lorsqu’ils envisagent leur propre avenir, seuls 25% se déclarant optimistes. Ce pessimisme trouve en partie son origine dans le la difficulté de plus en plus grande à épargner. Aujourd’hui, moins de quatre seniors sur dix indiquent avoir la possibilité d’épargner à la fin du mois (37 %). En comparaison, en décembre 2010, ils étaient près de six sur dix (56 %), soit un recul de 19 points. 

Cette réalité masque de fortes disparités au sein de cette catégorie très hétérogène qui regroupe des personnes d’l’âge, de statut professionnel, et de niveau économico-social très différents. Ces facteurs segmentent cette population au sein de laquelle ont été identifiés quatre groupes dont les besoins et les attentes en matière de services à la personne se distinguent :

  • ceux qui pourraient être qualifiés de « décrocheurs », en grande difficulté et qui ne parviennent qu’à survivre sur le plan économique ; 
  • ceux tentés par le repli ; 
  • ceux qui inventent des modes de vie et de consommation alternative ; 
  • ceux, les moins nombreux, qui sont aisés et se déclarent heureux. 

C’est face à ce constat que la FESP souhaite que toutes les questions relevant de la tarification et de l’équilibre économique de l’aide à domicile au sein des outre-mer fasse l’objet d’une étude annuelle pour pouvoir en dégager les disparités, mais aussi les grandes tendances propres à harmoniser les pratiques des collectivités.